Lutte contre l’insécurité : Les Comités locaux sur le pied de guerre

Publié le par Patriote

“Le Burkina est un pays de paix“ a-t-on coutume d’entendre. Si cela est vrai parce que ce pays ne connaît pas de guerre, il l’est aussi parce que la sécurité intérieure est garantie. La lutte acharnée contre le grand banditisme commence à porter des fruits. C’est le résultat d’une politique sécuritaire bien pensée et bien menée dont le principal instrument est “la police de proximité“.

Plus de 22000 patrouilles ont été effectuées en 2008 par les forces de sécurité nationales au Burkina. Sur les routes, aux frontières et dans les villes, c’est en moyenne 61 patrouilles qui sont faites chaque jour sur l’ensemble du territoire. L’objectif principal est la dissuasion. Ces patrouilles rassurent également les populations qui savent que les forces de l’ordre ne sont jamais bien loin. Pour ceux qui aiment voyager à l’intérieur du pays, ils remarquent la présence des gendarmes et policiers sur les grands axes qui, à une certaine époque ont été pris d’assaut par les coupeurs de route.

La police de proximité, ce sont aussi les escortes pour des personnalités mais également pour des gens ordinaires. Ceux qui empruntent nuitamment les compagnies de transport sur l’axe Ouagadougou - Bobo Dioulasso par exemple en savent quelque chose. Armées de fusils d’assaut et appliquant visiblement une stratégie longuement apprise, les forces de l’ordre se déploient dans le car de transport après avoir effectué une fouille minutieuse des passagers ; et sûr, que cette présence rassure, surtout que ces hommes ont, à plusieurs reprises, empêché des braquages alors que des cars étaient attaqués.

Un autre volet du concept de police de proximité est la collaboration des populations. Pendant longtemps, il était très mal vu de dénoncer un voisin à la police même celui-ci avait des activités criminelles. Bien souvent c’était la politique du silence qui primait et quand les populations étaient excédées, elles procédaient purement et simplement au lynchage du malfrat. Les choses ont beaucoup évolué aujourd’hui.

Sur le terrain, la communication est aussi devenue une arme pour les forces de sécurité. Aux cotés d’association et structures de lutte contre la consommation et le trafic de drogue par exemple, le ministère de la Sécurité a animé des conférences et a apporté son soutien matériel et son expertise à la lutte. La sensibilisation au cours de l’année 2008 a consisté également à briser les barrières entre les populations et les forces de sécurité.

L’esprit de la police de proximité

La police de proximité a été pensée pour permettre une symbiose d’actions entre les forces de sécurité et les populations. Elle met l’accent sur la prévention plutôt que la répression. C’est complètement un nouveau type de rapports qu’elle instaure afin de mieux lutter contre la criminalité. Il faut dire que cette nouvelle approche sécuritaire tire sa justification du relatif échec des politiques passées. Il s’agissait surtout de l’opération dite “coup de poing“, qui consistait pour les forces de la gendarmerie et de la police souvent appuyées par les militaires, à effectuer des descentes musclées chaque mois pour détruire des réseaux de banditisme. Ces actions ponctuelles résolvaient le problème pour un certain temps mais très vite, de nouveaux réseaux se formaient ; et cela parfois à la connaissance des populations qui n’alertaient pourtant pas les forces de l’ordre, vu la défiance qui existait à leur égard.

La police de proximité pour sa part vise à “tuer l’œuf du grand banditisme dans son embryon“. Il s’agit d’abord d’établir la collaboration avec la population, de définir avec elle les priorités en matière de sécurité et à partir des Comités Locaux de Sécurité, d’être alerté à temps de tout cas suspect. L’agent de police de proximité est un agent qui privilégie la prévention à la répression. C’est un agent qui est à l’écoute de la population et qui sait être assez irréprochable pour susciter la confiance.

Des résultats patents en 2008

Avec l'acquisition de gyrocptères, les forces de l'ordre passe à une autre vitesse dans la lutte contre le grand banditismeDepuis sa mise en œuvre en 2005, la police de proximité ne cesse d’engranger des résultats positifs. En 2008 la lutte contre la criminalité et le grand banditisme a produit des chiffres d’une rare éloquence. Elle a permis d’interpeller 3845 présumés délinquants dont 849 ont été déférés devant les tribunaux. La police de proximité a permis de retrouver 603 engins à deux roues volés et a saisi 196 armes à feu. La lutte contre la drogue s’est également intensifiée et à permis de saisir 7, 316 tonnes de cannabis, 19 kilogrammes de cocaïne et pas moins de 10,5 tonnes de médicaments de la rue.

Les actions de la police de proximité ont aussi permis de faire baisser considérablement les attaques à main armée sur les grands axes routiers. La route de Fada par exemple qui connaissait à une certaine époque environ un braquage par semaine est aujourd’hui plus sûre et les compagnies de transport qui refusaient de l’emprunter à partir d’une certaine heure de la nuit ont supprimé cette restriction.

Les résultats sont également au niveau de la collaboration des populations. Collaboration qui va chaque jour croissante. Les populations ont de plus en plus confiance en leur forces de sécurité et l’on peut même dire que ces dernières ont très bonne presse“ Mais pour en arriver à ces résultats, il a fallu mettre d’énormes moyens en œuvre.

Les moyens qui ont permis d’atteindre ces résultats

Humains, matériels et organisationnels, voici les types de moyens qui ont été mis en branle pour bouter le grand banditisme hors du Burkina. Sur le plan humain et cela depuis 2005, date d’entrée en vigueur de la politique de police de proximité, les services du ministère de la sécurité ont revu leur recrutement à la hausse. C’est ainsi qu’aujourd’hui la gendarmerie recrute chaque année 500 personnes et la police 700. Il y a également le recrutement des filles qui a débuté au sein de la gendarmerie et qui au sein de la police s’est renforcée. Il s’agit de donner un visage plus gracieux au bras armé de l’Etat, afin de rompre la barrière qui existe souvent avec les populations.

Le renforcement des moyens humains passe également par la formation. Une formation sur le concept de police de proximité et ses modes opératoires dispensées dans les différentes écoles techniques du ministère de la sécurité. Des spécialistes dans différents domaines ont également été formés, afin de tenir compte des nouveaux modes d’actions des criminels.

Les moyens se déclinent aussi sur le plan matériel. De nouveaux bâtiments ont été mis à disposition des forces de sécurité et les bâtiments qui étaient en piteux état ont été réfectionnés. Aussi des véhicules roulant ont été acquis afin de permettre plus de mobilité et même deux girocoptères, des engins volants plus aptes à parcourir le pays d’un point à l’autre pour traquer les grands bandits ont été achetés et mis en service.

Les Comités Locaux de Sécurité

Enfin sur le plan organisationnel, la police de proximité a un formidable outil que sont les Comités Locaux de Sécurité (CLS). Les Comités Locaux de Sécurité (CLS), sont le nouvel instrument de la police de proximité. Les CLS “traduisent l’engagement du gouvernement à organiser les populations pour qu’elles collaborent dans un cadre partenarial avec les services de sécurité que sont la police et la gendarmerie afin de lutter contre le grand banditisme notamment de façon préventive“

Plus de 2500 CLS ont été installés dans les villages et dans les secteurs. Et c’est loin d’être fini. Selon les derniers chiffres du ministère de la sécurité, cela ne représente que 55% de l’objectif. Les CLS sont des organes consultatifs de la police de proximité ; ils regroupent chacun 9 personnes proposées par la population du village ou du secteur concerné et nommées par le maire ou le préfet de la localité. Chaque CLS tient une assemblée générale par mois en présence d’un agent du ministère de la Sécurité, afin de faire le point sur les actions en cours et dégager les nouvelles orientations sécuritaires de la zone. A terme, 7941 Comités Locaux de Sécurité seront créés. Les Comités Locaux de Sécurité, outil de concertation et de collaboration des services de la sécurité et des populations, sont un lieu de sensibilisation sur la nécessité de collaborer avec les forces de l’ordre.

Les appels téléphoniques anonymes (au « 1010 », numéro gratuit) sont une autre forme non moins importante de la collaboration des populations à la lutte contre le grand banditisme. Au niveau du Centre National de Veille et d’Alerte (CNVA), 38.417 appels téléphoniques ont été enregistrés en 2008. Une contribution directe des victimes et des populations qui permettent aux agents du ministère de la sécurité d’aller vite et de mener au mieux leurs missions.

C’est nanties de tous ces moyens que les forces de l’ordre ont pu effectuer au cours de l’année, 22.417 patrouilles, dont 111 aux frontières, 5121 de police secours, 6849 interventions ponctuelles et 1512 escortes et accompagnements de sécurité de personnes.

Le cadre juridique d’exercice de la police de proximité

C’est au sommet de l’Etat qu’a été pensé et conçu le concept de police de proximité. Fruit d’une grande réflexion depuis de nombreuses années afin d’optimiser les actions de lutte contre la criminalité et le grand banditisme. Le fonctionnement, les attributions et autres aspects de mise en œuvre de la police de proximité sont régentés par le décret présidentiel n° 2005 263/PRES/PM/SECU/DEF/MJ/MATD/MPDH en date du 12 mai 2005. Mais c’est la loi 032-2003/AN relative à la sécurité intérieure, du 14 mai 2003, qui marque véritablement la naissance de la police de proximité. Elle définit en son article 8, la police de proximité comme consistant : “à intégrer au mandat opérationnel des forces de sécurité intérieure, la participation des communautés dans la gestion de la sécurité par la prévention de l’insécurité et de la criminalité à travers l’identification concertée des problématiques locales de sécurité et la recherche de solutions“.

Certes, la mise en œuvre de cette ambitieuse politique a été confiée en priorité aux ministères en charge de la sécurité et de l’administration territoriale, mais le ministère de la promotion des Droits Humains est aussi associé à sa réalisation.

Les comités Locaux de Sécurité (CLS) qui sont le principal outil de la police de proximité sont aussi régis par la loi qui fixe ses attributions et son fonctionnement. Ils sont régis par le décret 2005- 245/ PRES/ PM/ SECU/ DEF/ MATD/MJ/MFB/MPDH en date du 18 mai 2005.

L’article premier de ce décret indique que dans chaque village et secteur de commune du Burkina Faso, il sera crée un Comité Local de Sécurité ; l’article 2 précise que le CLS est placé sous la tutelle du préfet ou du maire. La loi précise que les membres des Comités Locaux de Sécurité sont choisis par les populations avant d’être nommés par arrêté du préfet ou du maire. Le bon fonctionnement des CLS est pour une grande part garant de la réussite de la police de proximité.

L’avenir de la police de proximité

En 2009, même les pistes rurales feront l’objet de patrouilles policières. Cela a déjà commencé et va se poursuivre sur l’ensemble du territoire. Le grand banditisme qui connaît encore quelques poches de résistance et qui même se renforce du point de vue de l’équipement, doit être réduit à sa plus simple expression. Le ministère de la sécurité entend rassurer les populations, pour qu’emprunter la route ne se fasse plus la peur ou ventre. Aussi, l’implantation des Comités Locaux de Sécurité va se poursuivre pour couvrir la totalité des villages et secteurs. Avec cet outil décentralisé, les forces de l’ordre devraient mettre à profit la contribution de la population afin de démanteler complètement les réseaux de grand banditisme.

La communication restera également un élément important pour le ministère de la sécurité. Il s’agira de casser le mythe du mutisme des forces de l’ordre. Des séances de sensibilisation sur la nécessité de collaborer avec les forces de l’ordre et sur les dangers de la consommation de la drogue seront renforcées. Pour ce faire, certains groupes sociaux seront impliqués ; il s’agit entre autres des transporteurs routiers et des agents des services de l’Action Sociale. Toujours concernant la lutte contre la drogue, les enseignants des lycées et collèges seront impliqués afin qu’ils passent le juste message aux élèves. Pour mener tout cela à bien, une nouvelle Direction a vu le jour au niveau du ministère de la sécurité. Il s’agit de la Direction de la police de proximité qui déjà remporte de nombreux combats
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