Communication présentée au Comité des droits de l’homme du Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’Homme, en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte International relat

Publié le par Patriote

Mariam Sankara

Auteur de la Communication

c.

Burkina Faso

Etat en cause


Communication présentée au Comité des droits de l’homme du Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’Homme, en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte International relatif aux droits civils et politiques

 



Mariam Sankara est représentée par les Conseils :

Collectif Juridique International Justice Pour Sankara

Me Bénewendé Sankara (Burkina Faso)
Me Dieudonné Nkounkou (France)
Me Devotsou Kofimessa(Togo)
Me Jean Abessolo (France)
Me Ferdinand Djammen Nzeppa(France)
Me Vincent Valaï (Canada)
Me May Chiu (Canada)
Me John Philpott (Canada)
Me William Sloan(Canada)
Me Shirley Moran (Canada)
Me Charles Roach (Canada)
Me Berteigne (France)
Me Bibi Barnabe (France)
Me Nicole Bobillot-Prévost (France)
Me Milton James Fernandes(Canada )


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 Sankara c. Burkina Faso
Comité des droits de l’homme

1-Victimes des violations alléguées

Victime 1 : Mariam Sankara
Nom : SANKARA
Nom de jeune fille : SERME
Prénoms : MARIAM
Nationalité : BURKINABE
Date et lieu de Naissance : 26 MARS 1953 MENAKA MALI

Victime 2 : Philippe Sankara
Nom : SANKARA
Prénom : Philippe Rekwendé
Date et lieu de Naissance 10 Août 1980 à Ouagadougou
Nationalité : BURKINABE

Victime 3 : Auguste Sankara
Nom : SANKARA
Prénom : Wendyam Auguste
Date et lieu de Naissance : 21 Septembre 1987 à Ouagadougou
Nationalité : BURKINABE

Victime 4 : Thomas Sankara
Nom : SANKARA
Prénom : Thomas Isidore Noel
Date et lieu de Naissance : 21 Décembre 1949 à Yako ( Haute Volta )
Profession : Président de la République du Burkina Faso jusqu’au 15 Octobre 1987
Nationalité : Burkinabè


2-Autres procédures internationales

Aucune autre procédure internationale n’a été intentée par les victimes à la date du dépôt de la présente communication.

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 Sankara c. Burkina Faso
Comité des droits de l’homme


5- Exposé des Faits et dispositions prises au nom de la victime pour épuiser les recours internes

L’auteur de la communication soumet respectueusement aux membres du Comité des droits de l’Homme que les recours internes ont été épuisés :

Le 15 Octobre 1987 le Président de la République du Burkina Faso, Thomas Sankara, époux de l’auteur et père des victimes mineurs : Philippe et Auguste, a été assassiné dans les locaux du Conseil de l’Entente à Ouagadougou au Burkina Faso.Ce même jour, quatorze personnes se trouvant avec le président Sankara ont été tués.

Le 17 Janvier 1988, le médecin commandant Diébré Alidou, signe un certificat de décès où il précise que le Thomas Sankara est décédé le 15 Octobre 1987 à 16h30 de mort naturelle, tel qu’il appert de la pièce P-1 ;

De 1987 à 1997, les autorités du Burkina Faso, ont refusé ou omis d’agir afin d’intenter des procédures pour enquêter sur cet assassinat, et ce malgré des appels informels ;

Le 29 Septembre 1997, avant la préscription extinctive, Mariam Sankara dépose en son propre nom et ès qualité de représentante légale de ses enfants mineurs Philippe Relwendé Sankara, Wendyam Auguste Sankara , une plainte contre X pour assassinat et faux en écriture administrative, tel qu’il appert de la pièce P-2 ;

Le 9 Octobre 1997, Une consignation de 1 million de francs CFA a été payée, et ce en vertu du Code de procédure pénale, tel qu’il appert de la pièce P-3 ;

Le 25 Janvier 1998, le Procureur du Faso présentait des réquisitions de non informer afin de contester la juridiction de droit commun, en soulevant que les faits allégués se sont passés dans l’enceinte d’un établissement militaire et que le certificat de décès émane d’un médecin militaire, tel qu’il appert de la pièce P-4 ;

Le 23 mars 1998 une ordonnance N. 06/98, fut rendue par le Juge d’instruction Alexis Kambiré, rejetant les réquisitions du Procureur de Faso et décidant que la juridiction d’instruction de droit commun, qu’est celle du Tribunal de Grande Instance de Ouagadougou est compétente, tel qu’il appert de la pièce P-5 ;

Le 2 Avril 1998, le Parquet du Burkina Faso en appelle de la décision N 06/98 et demande à la Cour d’Appel d’infirmer l’ordonnance aux fins d’informer, tel qu’il appert de la pièce P-6 ;

Le 4 Avril 1999, le Pacte et son Protocole facultatif rentre en vigueur pour le Burkina Faso ;


__________________________________________________ Sankara c. Burkina Faso
Comité des droits de l’homme

Le 10 décembre 1999, face au refus d’agir dans un délai raisonnable, les conseils du Collectif Juridique International Justice Pour Sankara mettent en demeure le Ministre de la Justice et le Conseil Supérieur de la Magistrature du Burkina Faso de prendre toutes les mesures afin de faire respecter l’équité procédurale, tel qu’il appert de la pièce P-7 ;

Le 17 janvier 2000, les autorités du Burkina Faso ont accusé réception de la Mise en demeure ( pièce P-7) tel qu’il appert de la pièce P-8 ;

Le 26 Janvier 2000, la Cour d’Appel de Ouagadogou par l’arrêt no 14 déclare les juridictions de droit commun incompétentes et infirme l’ordonnance no. 06/98 du 23 Mars 1998 et renvoit les parties à mieux se pourvoir tout en réservant les dépens, tel qu’il appert de la pièce P-9 ;

Malgré l’arrêt no. 14 de la Cour d’Appel, le Procureur de Faso a refusé ou omis de dénoncer l’affaire au Ministre de la défense afin que ce dernier donne l’ordre de poursuite ;

Le 27 Janvier 2000, les conseils des victimes contestent l’arrêt no .14 de la Cour d’Appel, en présentant un pourvoi à la Chambre Judiciaire de la Cour Suprême du Burkina Faso ;

Le 19 Juin 2001, dans l’arrêt 46, la Chambre Judiciaire de Cour Suprême, présidée par Monsieur Sibila Franck Compaoré, refuse ou omet de trancher le fonds de l’affaire en jugeant le Pourvoi de la partie civile irrecevable pour défaut de consignation, tel qu’il appert de la pièce P-11 ;

Le 19 Juin 2001, une demande des conseils des victimes est présentée en vain au Procureur de Faso de dénoncer l’affaire au Ministre de la défense, tel qu’il appert de la pièce P-12 ;

Le 19 Juin 2001, une demande est présentée au Ministre de la défense du Burkina Faso, de donner l’ordre de poursuite suite à la dénonciation qui sera faite par le parquet général, tel qu’il appert de la pièce P-13 ;

Le 25 Juin 2001, une nouvelle demande des conseils des victimes est présentée au Procureur de Faso afin de dénoncer l’affaire au Ministre de la défense conformément au Code de Justice Militaire, tel qu’il appert de la pièce P-14 ;

Le 23 Juillet 2001, le Procureur de Faso refuse ou omet de dénoncer l’affaire au Ministre de la Défenses, en soulevant des arguments liés à la prescription, et en se référant à l’Arrêt no 14 de la Cour d’Appel, tel qu’il appert de la pièce P-15 ;

Le 25 Juillet 2001, les conseils des victimes répliquent à la lettre du Procureur de Faso ( Pièce P-15), précisant l’interruption de la préscription en 1997, et réservant les droits des victimes, tel qu’il appert de la pièce P-16 ;

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Sankara c. Burkina Faso
Comité des droits de l’homme

7- Articles du Pacte International relatif aux droits civils et politiques qui auraient été violés

MARIAM SANKARA : articles 17 , 23, 26 et article 2 alinéa 1
PHILIPPE SANKARA : articles 17, 23, 26 et 14 alinéa 1
AUGUSTE SANAKARA : articles 17, 23, 14 alinéa 1. et 16
THOMAS SANKARA : articles 6 (1)

Le Comité devrait avoir une connaissance d’office que Thomas Sankara n’est pas décédé de mort naturel le 15 Octobre 1987. Le comité devrait également avoir une connaissance d’office des difficultés d’ester en justice de l’auteur, considérant qu’elle était l’épouse d’un Président de la République renversé par un coup d’Etat violant.

Les droits protégés par le Pacte ont été violés par l’Etat Burkinabè, en ce que Thomas Sankara a été assassiné et que l’acte de décès n’a pas été rectifié malgré plusieurs demandes judiciaires et extra-judiciaires, présentées auprès des autorités compétentes. Ces refus ou ces omissions d’agir des autorités du Burkina Faso, après l’entrée en vigueur du Protocole facultatif , constituent des violations qui se poursuivent après le 4 Avril 1999, puisque les effets continuent et constituent eux-mêmes des violations du Pacte pour chacune des victimes de la présente communication.


a) Le Burkina Faso a violé les articles 23 (1) et 17 (1) et 17 (2)

Le Burkina Faso se devait de protéger la famille, élément fondamental de la société et ce suivant l’article 23 (1) du Pacte, il ne l’a pas fait, de plus Mariam, Philippe et Auguste ont le droit d’être protégé des atteintes contre leur famille suivant l’article 17 (1) et 17 (2). En fait la non rectification de l’acte de décès, l’absence d’une enquête publique et de poursuite judiciaire afin de déterminer l’identité des auteurs et leurs responsabilités pénales et civiles constitue un déni grave de justice en ce qui à trait à la protection des membres de la famille Sankara : Mariam , Philippe et Auguste.

b) Le Burkina Faso a violé l’article 16 du Pacte

La personnalité juridique d’ Auguste Sankara, né le 21 Septembre 1987, tel qu’il appert de la pièce P-2 par.2, a été niée par la décision de la Cour Suprême le 19 Juin 2001. En effet, il existe une disposition d’ordre publique dispensant les mineurs de déposer une somme quelconque à titre de consignation d’amende, voir les articles 110 et 111 de l’ordonnance n. 91-0051/ PRES du 26 août 1991.
L’absence de la vérification de l’âge des enfants pour la Chambre d’accusation de la Cour Suprême, confirme ce déni de justice en niant la personnalité juridique d’Auguste Sankara ; voir à cet égard les paragraphes 4 et 5 de l’avis juridique de Halidou Ouedarogo sur l’application et l’interprétation de la Cour Suprême des articles 110 et 111 de l’ordonnance no. 91-0051/PRES du 26 Août 1991, tel qu’il appert de la pièce P-17 ;

__________________________________________________ Sankara c. Burkina Faso
Comité des droits de l’homme

c) Le Burkina Faso a violé l’article 26

Mariam Sankara et ses enfants n’ont pas eu droit à une enquête équitable et en bonne et due forme sur l’assassinat de Thomas Sankara et par conséquent le Burkina Faso ne leur a pas reconnu toutes les garanties liées à l’égalité devant la loi. En effet depuis l’entrée en vigueur du Protocole facultatif pour le Burkina Faso, le 4 avril 1999, le Burkina Faso a manqué a ses obligations en ne permettant pas à la famille Sankara de jouir pleinement de leurs droits et ce sans discrimination basée sur leur opinion politique.

L’ Etat du Burkina Faso n’a pas respecté son engagement de garantir à la famille Sankara les droits reconnus dans le Pacte sans distinction basée sur leur opinion politique et ce en vertu des l’article 26
et 2 (1).

d) Le Burkina Faso a manqué à ses obligations de mettre à la disposition des victimes un recours utile pour les droits violés en vertu de l’article 2 al. 3 a) et 3 b) et en n’assurant pas l’impartialité judiciaire en vertu l’article 14 (1)

Suite à la décision du Juge Kambiré le 23 Mars 1998, de reconnaître la juridiction de droit commun comme une juridiction compétente, une série de décisions partisanes des magistrats burkinabè, ont nié les droits les plus élémentaires des victimes.

Procédure devant la Cour d’Appel

Le Comité doit prendre note qu’ il a fallu que le Collectif Juridique, représentant les victimes mettent en demeure les autorités judiciaires pour que la Cour d’Appel décide de rendre l’Arrêt 14 en Janvier 2000 ;

Le Comité doit aussi examiner le bien fondé en droit de la décision de cette Cour, puisque les tribunaux de droit commun n’ont pas une telle compétence .

Procédure devant la Cour Suprême

La décision de la Cour Suprême a été prise par le Président Sibila COMPAORE, qui a battu campagne pour le président Blaise COMPAORE et le parti au pouvoir le CDP, tel qu’il appert du paragraphe 3 de l’avis Juridique de Halidou Ouedraogo, pièce P-17 ;

La composition de ce tribunal fait raisonnablement craindre que la décision manque l’impartialité requise dans les circonstances.

Le Comité doit aussi examiner le bien fondé en droit de la décision de la Cour Suprême, car elle a l’effet de nier aux victimes tous recours utile dans les circonstances.

 


Sankara c. Burkina Faso

Comité des droits de l’homme

Il existe de grave lacunes dans le raisonnement juridique de la décision de la Cour Suprême du Burkina Faso de ne pas trancher sur le fonds de l’affaire en se basant sur un défaut de consignation allégué de 5000 francs CFA soit environ 7 Euros. C’est un prétexte afin de ne pas statuer sur le fonds du dossier , tel qu’il appert de la pièce P-17 ;

e) Le Burkina Faso a violé l’article 26

Mariam Sankara et ses enfants n’ont pas eu droit à une enquête en bonne et due forme sur l’assassinat de Thomas Sankara et par conséquent le Burkina Faso ne leur a pas reconnu toutes les garanties liées à l’égalité devant la loi. En effet depuis l’entrée en vigueur du Protocole facultatif pour le Burkina Faso, le 4 avril 1999, le Burkina Faso a manqué a ses obligations en ne permettant pas à la famille Sankara de jouir pleinement de leurs droits et ce sans discrimination basée sur leur opinion politique.

L’Etat du Burkina Faso n’a pas respecté son engagement de garantir à la famille Sankara les droits reconnus dans le Pacte sans distinction basée sur leur opinion politique et ce en vertu de l’article 2 (1).

f) Le Burkina Faso a violé l’article 6 (1)


En agissant de la sorte le Burkina Faso continue à enfreindre la dignité de Thomas Sankara reconnu par le Préambule du Pacte et son droit de ne pas être arbitrairement privé de la vie en toute impunité.


Collectif Juridique International Justice Pour Sankara
le 15 Octobre 2002



source : Grilla.org

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